Les éditions L’Harmattan viennent de publier L’Enfant imaginé – Entre souffrerrance et résilience, de Martin Mauriol. Un premier roman pour ce Martiniquais, ancien enseignant qui a choisi de dévoiler une histoire qui commence par celle d’un « ti yich » et de « son arrière-grand-mère paternelle ».
Cette chronique d’une jeunesse et d’une scolarité en pays créole commence avec une première expérience douloureuse : « Le jour de la rentrée des classes, Arthur, instituteur et père du petit Rodrigue, le laisse à la porte de son école maternelle et disparaît sans crier gare ». Comme d’autres avant lui, Martin Mauriol entraîne le lecteur dans le monde de l’enfance, et plus particulièrement celui que constitue l’école sur une terre comme la Martinique, mais son propos ne s’arrête pas à cette introspection. Il s’agit aussi d’exhaler les relations entre Rodrigue, petit bonhomme « si frêle, si timide en apparence », et Man Philomène, l’arrière-grand-mère paternelle, dont la pugnacité lui avait permis de défier un tigre dans la forêt de Saint-Laurent du Maroni, en Guyane où elle avait vécu. Plus encore, l’auteur compose aussi autour du lien qui peut se dessiner entre le fils victime de l’abandon et son père, sans cesse imaginé, parti peut-être se chercher une nouvelle vie.
L’Enfant imaginé – Entre souffrerrance et résilience, dont Martin Mauriol nous parle dans l’interview ci-dessous, sera également au centre d’une rencontre le mardi 8 avril 2014 à 19 h à l’espace L’Harmattan, 21 bis rue des Ecoles dans le 5e arrondissement de Paris. L’occasion de présenter son roman en librairie depuis ce mois-ci.
e-Karbé – Le titre de votre roman « L’Enfant imaginé – Entre souffrerrance et résilience », laisse d’emblée l’impression d’un récit au ton grave et solennel. Est-ce une première impression juste ?
Martin Mauriol – Oui, le sujet est grave puisqu’il s’agit de la vie d’un jeune garçon qui se sent abandonné par son père le jour même de sa rentrée à l’école maternelle.
Sur quoi se construit la relation qui lie Rodrigue à Man Philomène ? Et sur quels principes (culturels ou autres) repose le discours de cette arrière-grand-mère paternelle qui souhaite voir son arrière-petit-fils « avancer sur le chemin de l’excellence » ?
La relation de Rodrigue et de son arrière-grand-mère se fonde sur le désir de celle-ci de faire de lui un « Monsieur-Nègre », comme Aimé Césaire à qui elle voue une profonde admiration. Elle aimerait que son « Ti yich » devienne quelqu’un qui sait bien parler le français. C’est d’ailleurs pour cela qu’elle lui interdit de parler créole, parce qu’elle pense que parler créole nuit à l’apprentissage du français et que le créole est réservé aux gens du peuple dont elle fait partie. Elle regrette beaucoup de n’avoir pas pu aller à l’école et de ne pas savoir parler français. Donc, elle veut que son petit réussisse sa vie en réussissant à l’école.
Arthur, instituteur et père qui abandonne Rodrigue, est l’autre personnage de ce roman, dont Man Philomène n’hésite pas dire tout le mal qu’elle pense. Comment le faites-vous exister dans la vie de Rodrique ?
Arthur est effectivement le père de Rodrigue, un enfant qu’il a désiré, aimé, mais qu’il a dû abandonner pour des raisons qui sont données dans le livre. Il existe d’abord par Rodrigue rendu très malheureux par son départ, par la correspondance, d’abord imaginaire, que Rodrigue entretient avec lui, puis par la correspondance réelle qui va suivre.
A travers ce roman, souhaitez-vous également évoquer les rapports entre le français, parlé par l’enfant, et le créole, parlé par son aïeule ?
Oui, je fais coexister les deux langues puisque l’enfant parle en français et son aïeule lui répond en créole, avec quelques tentatives de parler en français.
Vous avez été instituteur à la Martinique, dans quelle mesure votre itinéraire au sein du monde de l’éducation vous a-t-il inspiré pour ce roman ?
Mon parcours d’instituteur m’a effectivement inspiré pour faire vivre l’enfant et son père puisqu’au moment où ils vont se retrouver, c’est par le chant et la poésie qu’ils vont surmonter, pour l’un, sa rancune et pour l’autre, sa culpabilité et ses regrets, et qu’ils vont trouver le chemin du pardon.
Le père et son fils découvrent qu’ils ont en commun l’amour du chant et de la poésie.
L’enfant imaginé – Entre souffrerrance et résilience
Mars 2014, 484 pages, éditions l’Harmattan
Prix éditeur : 34 euros