Des Chinois en Guyane et en Martinique, un film de Jil Servant sur l’immigration chinoise en Guyane et en Martinique, est diffusé le jeudi 24 mars sur RFO Télé Guyane.
L’auteur du documentaire adopte un comportement critique pour redonner toute sa dimension à l’histoire de l’immigration chinoise en Guyane et en Martinique : « la place des Chinois en Guyane est très importante, il s’agit d’une communauté implantée depuis de nombreuses années, les premières installations remontant au milieu du XIXe siècle. Aujourd’hui, elle appartient au paysage culturel guyanais car elle y a apporté des éléments indéniables […] Dans le nord de la Martinique, un morne est baptisé Yang-Ting, du nom d’un pharmacien qui l’avait acheté au début du 20e siècle. A Fort-de-France, la préfecture, quelques enseignes de magasins, des pharmacies, des laboratoires d’analyses médicales, des avocats, quelques restaurants nous apprennent qu’une communauté chinoise existe véritablement sur l’île […] ».
Il s’agit au départ de s’interroger sur le manque d’informations ou de données sur l’immigration chinoise en Martinique et Guadeloupe. Pour mettre un terme à un siècle et demi de méconnaissance et même de déficience, le réalisateur effectue une véritable incursion dans des multiples questions multiculturelles ou identitaires qui peuvent offrir des éléments de réponses.
A la suite de trois vagues migratoires distinctes, la première autour des années 1860, la deuxième entre 1920 et 1970 et la troisième de 1980 à nos jours, une communauté chinoise s’est constituée en Guyane et en Martinique. Les deux premières vagues sont majoritairement constituées de Chinois hakkas, provenant du Sud-Est de la Chine, une région traditionnelle d’émigration depuis le 19ème siècle, le Guangdong (plus connu en France sous le nom de Canton).
Les premiers hakkas arrivés ont presque tous fui une Chine alors déclinante et piégée dans des « guerres de l’opium » qui l’obligeront à s’ouvrir malgré elle aux puissances occidentales telles la France et la Grande-Bretagne. Ce sont des paysans miséreux engagés pour travailler dans des plantations de canne à sucre mais qui presque toujours parviendront très rapidement, comme souvent dans les diasporas chinoises, à ouvrir des petites boutiques et contribueront largement à l’essor du petit commerce en Martinique et en Guyane. La plupart vont s’intégrer très rapidement, quitte à se marier avec des Créoles et à ne pas transmettre la langue hakka et la culture chinoise à leurs enfants. Très vite, ils deviennent pleinement Guyanais et Martiniquais. Même si, parmi ces deux premières vagues, certains ont conservé leurs traditions sur plusieurs générations, ils se distinguent de la dernière vague issue majoritairement d’une autre région plus au nord de la Chine, le Zhéjiang.
Les Zhéjiang parlent un autre dialecte et ont plus d’attaches avec la Chine, où souvent ils ont conservé de la famille voire des biens. Le fait qu’ils soient arrivés plus tardivement implique une moindre insertion dans les sociétés locales, mais déjà beaucoup ne partiront plus.
Forcément, le documentaire photographie les réalités multiculturelles et les sujets à caractère identitaire qui ne manquent pas d’apparaître. Le métissage et le mélange des cultures, issues de cette immigration chinoise, revêtent des réalités très différentes selon qu’on se retrouve en Guyane ou en Martinique. Dans le premier pays, la communauté chinoise implantée depuis le 19e siècle et décrite comme « très importante » par le réalisateur, est une composante incontournable du pays. En Martinique, il s’agit selon lui d' »une communauté très discrète voire silencieuse« . Deux réalités différentes mais qui toujours suscitent des questionnements tant sur l’évolution que sur les expectatives de chacun. Comme le confirme le second documentaire (52 minutes) intitulé Des Guyanais et des Martiniquais en Chine.