Le Musée du Quai Branly à Paris présente jusqu’au 16 février 2025 une exposition sur les croyances vaudou en Haïti et plus spécifiquement sur celles qui entourent la figure énigmatique du zombi. Une invitation à mieux appréhender les croyances qui entourent ce mythe empreint d’idéologies plurielles africaines, caribéennes et catholiques.
Inaugurée au début du mois d’octobre et visible jusqu’à mi-février 2025, Zombis la mort n’est pas une fin ?, présentée en trois temps, explore les caractéristiques sociologiques et historiques du zombi à travers les préceptes et savoirs en lien avec le vaudou haïtien.
L’exposition s’attache à détailler en premier lieu différents éléments et doctrines spécifiques au vaudou haïtien, pour ensuite s’intéresser aux racines d’Afrique subsaharienne et précolombiennes des zombis, sans omettre les empreintes durables et profondes de l’esclavage et de la traité négrière. Une troisième partie de l’exposition concerne principalement « la mondialisation du phénomène des zombis ».
Zombis la mort n’est pas une fin ?
À la croisée du monde des morts et des vivants, la figure du zombi a fortement imprégné la culture populaire et le cinéma fantastique mondialisés. Elle provient initialement d’un syncrétisme complexe, lié à la colonisation d’Haïti et aux routes transatlantiques de l’esclavage qui, à partir du 16e siècle, font converger pratiques et croyances magico-religieuses de l’Afrique sub-saharienne, éléments du catholicisme romain et savoirs autochtones de la Caraïbe associés à la maîtrise des drogues naturelles.
L’exposition aborde la zombification rattachée à la religion vaudou haïtienne, au cours de laquelle un individu ayant commis un méfait serait jugé, condamné, drogué, enterré vivant, exhumé puis exilé et transformé en esclave sous la garde d’un maître (bokor).
À travers différents objets liés au rituel de la zombification, un temple et un cimetière vaudous reconstitués, ainsi qu’une « armée de guerriers Bizango », Zombis. La mort n’est pas une fin ? interroge une réalité anthropologique polymorphe, entre savoir et fiction.
Une expo en trois temps
Le visiteur entre dans l’exposition en découvrant d’abord le vaudou (vodou) haïtien, « une religion à part entière, mais aussi une culture », orchestrée notamment par une dizaine de sociétés secrètes, etc. « Ainsi, la première partie de l’exposition présente ses codes généraux, l’organisation des dieux et du culte, les rituels autour des défunts et les divinités liées à la mort (Ioas), en particulier Baron Samedi et Grande Brigitte. Une « armée de guerriers Bizango » (groupe d’une vingtaine de poupées « fétiches » de la société secrète Bizango participant au jugement de l’accusé), un temple vaudou grandeur nature, ainsi qu’un cimetière sont reconstitués (…). Cette première partie « présente les récits de huit individus considérés comme zombis depuis le début du 20e siècle ».
La première partie de l’exposition qui montre un monde particulier à Haïti, permet dans un second temps de mieux comprendre l’origine des zombis version haïtienne. On y découvre les fondements des dogmes qui entourent la zombification à Haïti, phénomène qui « se situe à la convergence de trois phénomènes : les religions d’Afrique sub-saharienne (et notamment les pratiques de sorcellerie visant à porter atteinte à distance à des victimes) ; les routes de l’esclavage sur lesquelles se sont rencontrées croyances et cultures de trois continents ; et la maîtrise des poisons et des substances stupéfiantes par les populations autochtones de l’arc de la Caraïbe (Arawak, Taïnos, Caraïbes). En République démocratique du Congo, l’étymologie du mot zombi correspond au fantôme d’un enfant mort. De nombreuses religions d’Afrique sub-saharienne considèrent les âmes errantes et les corps morts comme des réalités. Ces entités surnaturelles, et les pratiques qui leur sont liées, sont évoquées dans la deuxième partie de l’exposition (…). »
Zombis la mort n’est pas une fin ? éclaire à la fois la complexité et la multiformité du vaudou et ses croyances qui se caractérisent par la coexistence de « rites des populations autochtones de l’arc Caraïbe, représentés dans l’exposition par des objets Taïnos », ainsi que « d’images pieuses catholiques provenant initialement d’Italie et de Cuba » et toutes « sont des constantes des temples et des offrandes vaudous » également imprégnées de divers aspects du « catholicisme romain importé par les colonisateurs, par l’esclavage et la traite négrière ».
L’événement aborde enfin « la mondialisation du phénomène des zombis » à partir de sa redécouverte « lors de l’occupation américaine d’Haïti ». Une redécouverte qui se traduit par la présence des zombis « dans les créations littéraires. Ils hantent l’œuvre des auteurs haïtiens René Depestre et Dany Laferrière, ils déambulent dans les rues lors des fêtes religieuses et païennes ».
Zombis. La mort n’est pas une fin ?
Du 8 octobre 2024 au 16 février 2025