La rentrée littéraire chez Ibis Rouge Éditions a vu la parution de plusieurs livres, notamment à la rubrique histoire et géographie. Mais l’autre actualité de la maison d’édition consiste en la mise à disposition de l’intégralité de son catalogue dans une librairie cayennaise. « Tous nos titres sont maintenant disponibles à la librairie La Cas’ à Bulles (Lettres d’Amazonie) à Cayenne… C’est une première en Guyane. Un libraire décide de mettre dans ses rayons l’intégralité de notre catalogue » annonce Jean-Louis Malherbe dans un communiqué. Le fondateur d’Ibis Rouge Éditions voit dans cet événement une « preuve de grand professionnalisme« . La Cas’ à Bulles devrait donc disposer dans ses rayons les dernières parutions de l’éditeur :
Justin Catayée et la question de l’égalité républicaine de Serge Mam Lam Fouck
La figure de Justin Catayée est peu connue hors de la Guyane, le pays qu’il a représenté à l’Assemblée nationale de 1958 à 1962. Sa portée dépasse pourtant les frontières de la France et des pays de l’outre-mer français, pour concerner la tragédie du rapport à l’Autre en situation de domination.
Justin Catayée a refusé l’enfermement de ses compatriotes de Guyane dans la situation de citoyens de seconde zone. Il s’est également opposé à leur représentation dans la posture du colonisé. Il pensait que la qualité de citoyens français, qu’il proclamait avec fierté, avait vocation à ouvrir les portes de l’égalité républicaine à tous. Il dut rapidement déchanter, lorsque la proposition d’une certaine autonomie au sein de la République qu’il formula, pour sortir la Guyane de ses difficultés économiques, lui valut d’être traité en quasi-ennemi de la France, pratiquement assimilé aux nationalistes aspirant à l’indépendance.
Il avait pourtant foi dans le principe de l’égalité républicaine, au nom duquel il entendait marier les intérêts de la Nation et l’aspiration au développement d’un pays qu’il pensait en citoyen français. Il disparut brutalement de la scène politique guyanaise lors de l’accident d’avion qui endeuilla les Antilles françaises et la Guyane le 22 juin 1962.
A la suite de plus d’un demi-siècle de déchirements (1956-2010) sur la question du rapport à la France, l’analyse du discours qu’il a tenu au cours des années 1960 révèle les talents d’un visionnaire, qui a compris l’identité politique de la Guyane comme l’association de l’autonomie et de l’appartenance indiscutable à la République française. L’approche qu’il en eu apparaît aujourd’hui comme la plus féconde au plus grand nombre. Lui qui n’a connu que l’incompréhension de la majorité de ses compatriotes de Guyane, qui, sous les effets de la décolonisation triomphante, se trouvèrent ligués contre un projet politique jugé bien suspect ; lui qui, sous la présidence du général de Gaulle, n’a connu que la défiance des gouvernements, trop engagés dans les affaires africaines (guerre d’Algérie et marche vers l’indépendance des pays de l’Afrique subsaharienne), pour percevoir le trait innovant de son projet de société.
L’exposition coloniale de 1889 : la Guyane présentée aux Français, Odon Abbal
Dans cet ouvrage, Odon Abbal montre comment s’élabore un discours officiel autour de la colonisation et comment se construisent les stéréotypes trompeurs qui vont figer pour longtemps l’image perçue de cette « vieille colonie ». L’action se déroule au moment de l’Exposition coloniale en 1889 et est initiée par les membres du parti colonial et des responsables guyanais eux-mêmes. Leur but : promouvoir une terre qui souffre d’un déficit d’image. Dans ce contexte, tout un processus de construction du passé se met en place, chacun imagine une Guyane paradisiaque mais uniquement organisée autour de la domination européenne. Des décennies plus tard, les fondements de ce discours sont encore à même de brouiller les esprits et aviver les passions.
Odon Abbal vit et travaille en Guyane depuis plusieurs années. Il est docteur en histoire, spécialiste de la Grande Guerre, auteur de nombreux articles sur la question de la captivité. Il a publié en 2001 un ouvrage sur les prisonniers de guerre, Les soldats oubliés. Il a réalisé plusieurs travaux sur l’histoire sociale et régionale en Languedoc-Roussillon. Il s’est intéressé aussi à l’outre-mer et à l’histoire coloniale. Il dirige depuis 2000 la revue Les cahiers de Wallis et Futuna et a publié un ouvrage sur Wallis et Futuna aux temps premiers de la mission (2004).
La Guyane pour un développement durable amazonien, Daniel Mangal
La Guyane, qui est le plus vaste département français, possède l’unique forêt tropicale de l’espace européen. En raison de ses particularités historiques et sociales et de sa position géographique, une double problématique récurrente se pose : l’aménagement et la valorisation du territoire.
L’administration française prône une préservation totale de ce dernier espace forestier, resté intact grâce à de multiples mesures de protection. Les Guyanais, quant à eux, revendiquent le désenclavement de leur département, l’exploitation et la réglementation des ressources naturelles (tels que le pétrole et l’or) afin d’accéder à un certain développement économique.
L’histoire politique et sociale de la Guyane, ses ressources naturelles insoupçonnées, sa faune, ses populations et leurs cultures sont autant de thèmes que l’auteur aborde dans cet ouvrage très bien documenté afin de démontrer l’urgente nécessité d’une nouvelle vision du développement guyanais.