Parmi les nouvelles éditions des guides de voyages Petit futé, plusieurs sont consacrées aux îles et à la région des Caraïbes. Dans la collection country guide vient de paraître l’édition 2013-2014 du guide consacré à Saint-Martin et Saint-Barthélemy. Les voyageurs de tout genre pourront y découvrir comment se divertir sur ces deux îles qui attirent les riches personnalités mais où surtout se retrouvent une diversité de populations. Bons plans et conseils avisés pour découvrir Saint-Martin et Saint-Barthélemy. Seul, en famille ou entre amis, on y retrouve des informations pratiques pour profiter au mieux de son séjour au meilleur qualité/prix, comme à chaque fois dans cette collection.
Cap sur Saint-Martin
« La frontière matérielle, celle du pointillé sur la carte, n’arrête pas le voyageur : ni policiers, ni douaniers à engueuler, mais un petit monument qu’on photographie au passage. Ce qui divise démentiellement l’île de Saint-Martin c’est une frontière épaisse de lois différentes, de tribunaux, de monnaies, d’enseignements, de travaux publics, etc. devant laquelle l’observateur non prévenu sent sa raison lui échapper. » (Jean Raspail, 1973.) Saint-Martin/Sint Marteen, île bicéphale partagée entre la France et le royaume des Pays-Bas depuis un peu moins de quatre cents ans, est certainement l’un des plus singuliers territoires français d’outre-mer. L’île a connu ces vingt dernières années une spectaculaire montée de fréquentation et ses galons de paradis caraïbe dans l’imaginaire du vacancier. Ces trente-cinq plages l’y aident, suppléées par des grands travaux d’aménagement et de vastes opérations immobilières destinés à absorber l’afflux de touristes séduits par cette petite île à l’identité mosaïque. Ce qui la rend unique, c’est l’apparente aisance avec laquelle elle mélange les genres : volontarisme et énergie nord-américaine de la partie néerlandaise avec ses immenses resorts, ses paquebots géants, ses boutiques duty free à tous les coins de rues qui contrastent avec l’identité plus « Vieille Europe » des parties françaises, ses restaurants sélects, sa relative indolence, le tout sur fond de cordialité et de cool caribéen. Entre les deux, pas de frontière, et, pour les deux, exonération de droits de douane et de TVA. Non content d’aligner ses plages paradisiaques, Saint-Martin/Sint Maarten a pour beaucoup l’attrait d’un paradis fiscal.
C’est d’ailleurs ce qui amène les croisiéristes, très majoritairement américains, marée acheteuse qui remplit les boutiques de Philipsburg, la capitale du côté néerlandais ; on les retrouvera peut-être plus tard à Marigot, la capitale du côté français, assis à la terrasse d’un restaurant en front de mer. L’île invite par ailleurs à un étonnant jeu des sept familles, à la réserve près que les familles seraient ici au nombre de quarante-cinq, plus de quatre-vingts dit-on parfois, tant les nationalités sur l’île sont nombreuses. On y passe sans problème de l’anglais au créole (guadeloupéen ou haïtien), du français au broken english, du néerlandais à l’espagnol… Dans ce grand mixage de langues et d’origines, parcourir Saint-Martin c’est découvrir en transversale le monde caribéen, une communauté de destins forgée loin de la métropole, une version vendeuse des Caraïbes et qui sait satisfaire sa clientèle, jonglant habilement avec les clichés comme les identités.
… Et Saint-Barthelemy :
« Le meilleur service que l’on peut rendre à Saint-Barth est de ne pas en parler », dirait un avocat d’affaires. L’île cultive effectivement une discrétion de bon ton. Elle est connue, tout de même et à juste titre, comme étant un entre-soi de milliardaires. Il suffit d’ailleurs pour s’en convaincre d’ouvrir l’annuaire local pour tomber à la lettre A sur le nom d’Abramovich, Roman de son prénom, oligarque russe et heureux propriétaire du Chelsea FC et d’une villa dans l’île. La liste des rich and famous qui y ont leurs habitudes est trop longue pour être dressée, elle s’affole et devient démente au moment du Nouvel An où les villas s’arrachent à la location – hebdomadaire – à coup de dizaines, voire centaines de milliers d’euros. Alors Saint-Barth, confetti caraïbe de 24 km2, simple bouton de manchette pour costume de milliardaire ? Eh bien non, cette donnée n’est qu’un des calques qui composent sa topographie. Il y a vraiment un art de vivre Saint-Barth, fait de luxe discret, de calme et de sécurité. Il y a une simplicité aussi, on se salue, se croise nécessairement, l’auto-stop est courant, tout le monde circule en petit 4×4, en voiture électrique, le genre Hummer ou Porsche Cayenne est prié d’aller se faire voir à Saint-Tropez… Il y a la beauté étonnamment sauvage d’une nature soumise à de grands vents, à un climat qui érode et dont l’âpreté renvoie à la population originelle de l’île, ces colons bretons ou normands et leurs esclaves, qui n’ont pas connu la prospérité des grandes plantations de canne à sucre, qui se sont accrochés à ce caillou impropre à la culture, pour se retrouver sous l’attention prédatrice des puissants de ce monde, et des promoteurs, ce qui n’a pas semblé trop les impressionner. Ici, les permis de construire se distillent au compte-gouttes, les maisons ne dépassent pas la hauteur d’un palmier, elles doivent respecter de strictes normes architecturales. L’île a bataillé pour conserver son – fragile – équilibre, et elle continue de marquer des points dans le coeur de qui ne se déplace pas en jet mais n’en aime pas moins les lieux qui ont du caractère.