Le 17 novembre dernier, l’émission 360°-GÉO, qui est diffusée sur Arte depuis 1999 en coopération avec le célèbre magazine papier, consacrait un numéro à la fabrication du rhum agricole de Guadeloupe. Ce documentaire réalisé par Vincent Froehlyest est rediffusé ce merci 20 février à 13 h.
Sur cette île des Petites Antilles françaises, on aime dire, pour plaisanter, que personne ne sait plus si l’île a précédé le rhum, ou inversement. Cela se comprend : à la Guadeloupe, tout tourne autour de cette industrie, qui a forgé la philosophie des insulaires. Le rhum guadeloupéen est le meilleur de tous, selon les plus fins connaisseurs. Rien à voir avec les rhums industriels et traditionnels faits à partir de la mélasse. Le rhum agricole de la Guadeloupe est directement distillé à partir du jus de la canne à sucre, que coupaient autrefois les esclaves noirs. 360° – GEO s’est rendu sur l’île et témoigne d’une culture en pleine évolution, avec des Guadeloupéens qui, aujourd’hui, font partie de l’Europe unie, mais ne peuvent ni ne veulent oublier leur passé.
La distillerie de la famille Longueteau est la plus ancienne de la Guadeloupe. Ici, rien n’a changé, l’usine fonctionne comme il y a un siècle : sans électricité, sans gasoil, sans essence. Le piston qui fait tourner le moulin fonctionne à la vapeur, elle-même produite à partir des résidus de cannes dont le jus a été extrait. Malheureusement, le vieil engrenage tombe de plus en plus souvent en panne. Et c’est justement le cas, en ce mois de mars où la récolte bat son plein, alors qu’on aurait besoin de ce fichu appareil. Le patron, François Longueteau, travaille depuis des jours avec son mécanicien pour essayer de remédier au problème. Chaque jour qui passe coûte cher, les réserves dans les fûts commencent à tarir. En Guadeloupe, il n’y a guère d’autres moyens de gagner sa vie, l’île entière, ou presque, vit de la transformation de la canne. Une vraie richesse, mieux encore que la banane, ou autrefois le café et le cacao. La canne à sucre a été introduite par Christophe Colomb, qui a découvert l’île en 1493, et qui se l’est petit à petit appropriée aux dépens de ses premiers habitants. Les colons français ont apporté leur savoir-faire en matière de distillation et, au cours des siècles, la canne est devenue la première ressource du pays. Aujourd’hui, au pied de la Soufrière, Christophe Colomb et ses hommes trouveraient plus facilement du rhum que de l’eau. Mais le temps des récoltes est limité, François Longueteau et son équipe n’ont que quelques mois pour rentrer les cannes et les transformer. S’ils ne parviennent pas à remettre leur vieille machine en marche, ce sera une grosse perte pour l’entreprise, et un revers pour l’économie guadeloupéenne.