30° Couleur, le film de Philippe Larue et Lucien Jean-Baptiste, sort aujourd’hui sur les écrans de cinéma. Humour, rencontres entre deux cultures, retour au pays et redécouverte de son histoire sont au menu de cette nouvelle réalisation de Lucien Jean-Baptiste, qui donne un propos universel à une chronique, au départ, martiniquaise.
Dans ce nouveau film, on est loin de La première étoile : ici, la démarche, la mise en œuvre et l’objectif sont différents. Philippe Larue et Lucien Jean-Baptiste, même s’ils conviennent avoir « un terreau commun », ont combiné leurs points de vue pour faire naître ce nouveau projet pour lequel le premier rôle est confié à Lucien Jean-Baptiste. « Philippe avait envie que j’évolue comme acteur. Et inutile de vous dire que je partageais ce désir de m’éloigner de mon emploi habituel du « gentil black ». Surtout, au-delà de mon cas, de faire évoluer les choses dans le cinéma français : jouer un Noir qui occupe un poste important comme il y en a de plus en plus aujourd’hui. Or, Patrick a non seulement le savoir, mais aussi le pouvoir et l’argent. Et, pour le jouer, je me suis donc imprégné de la manière dont ces gens de pouvoir se tiennent physiquement avec une certaine droiture. Cela m’a permis d’aller à l’opposé du personnage de La première étoile qui était, à sa manière un cliché : le Noir qui n’a pas de travail, turfiste, fainéant… ».
Le casting recèle de bonnes surprises, au nombre desquelles le conteur et comédien martiniquais José Dalmat qui joue le rôle du beau-frère de Patrick. Lucien Jean-Baptiste considère avoir « eu la chance d’aller en Martinique et de rencontrer des acteurs incroyables qui nous ont permis de charger le film en authenticité ». Édouard Montoute tient, quant à lui, le rôle de Zamba pour lequel il a pris le temps de s’imprégner de son personnage : « Rentrer pour la première fois dans le costume de carnaval de Zamba fut un moment vraiment galvanisant. Il apporte 50 % du personnage. Mais il faut aussi s’y habituer car ce costume de carnaval n’a évidemment rien de seyant. Mon travail consiste à incorporer ces difficultés-là. Et à ne pas oublier que Zamba n’a pas plus que moi l’habitude d’être habillé ainsi ou d’être chaussé de talons hauts. Cela ne lui arrive que trois jours par an, lors du carnaval ».
30° Couleur, l’histoire
Patrick est un homme rigoureux et borné. Élève brillant aux Antilles, sa mère l’a envoyé à l’âge de dix ans pour faire ses études en « France ». 30 ans plus tard, il est devenu un historien réputé et fier. Coupé de sa famille et de ses traditions, il s’est intégré au point d’en avoir oublié ses racines. Un noir devenu « blanc à l’intérieur »…
Apprenant que sa mère est sur le point de mourir, il part en urgence pour la Martinique, avec sa fille unique, et y débarque en plein carnaval. Durant trois jours, accompagné de son ami d’enfance, l’irrésistible Zamba, il va être emporté dans un tourbillon de folie, d’émotion, d’humour et de situations rocambolesques. Un voyage initiatique rythmé par l’ambiance et les couleurs du carnaval. Trois jours qui vont changer sa vie.
Quelques avis et critiques
Ils ont réussi à glisser leurs personnages dans cette fête de masse, qui est filmée ici à la fois comme une célébration de cette culture construite dans la lutte (contre l’esclavage, contre la marginalisation) et un moyen d’échapper à la réalité.
[Thomas Sotinel – Le Monde]
L’idée, qui fait penser à Case départ, est ici exploitée avec un sérieux inattendu et sans trop de concessions au politiquement correct. Plongé dans une ambiance de carnaval (l’action se situe pendant Mardi Gras, fêté durant quatre jours aux Antilles), le héros va se perdre puis se retrouver, flanqué d’un sidekick épuisant déguisé en drag-queen. Ce dernier est le Jar Jar Binks du film, autrement dit son talon d’Achille.
[Christophe Narbonne – Première]
La tragédie de l’enfant déraciné, éloigné dans un geste d’amour, par sa mère, pour qu’il ait une vie meilleure, offre les plus belles scènes du film, dans lesquels Lucien Jean-Baptiste se révèle réellement. 30° Couleur offre de bons moments de comédie, notamment avec le beau-frère du personnage incarné par Lucien Jean-Baptiste, mais cette dimension comique étouffe la tragédie qui se joue derrière et qui n’a malheureusement pas le temps de se développer.
[Camille Esnault – Toutlecine.com]