Le musée Dapper réunit pour la première fois dans une manifestation prestigieuse arts d’Afrique et créations des Caraïbes. Le public découvre les diverses fonctions que remplissent les sorties de masques en Afrique et les rôles sociaux, politiques ou identitaires propres à certaines pratiques carnavalesques des Caraïbes.
« Mascarades et carnavals »,c’est la toute prochaine exposition de musée Dapper qui ouvrira dès le vendredi 5 octobre. L’exposition conçue et réalisée par le musée Dapper, sur les conseils de Marie-Denise Grangenois et de Michel Agieret, se présente et constitue « un événement majeur qui réunira des œuvres traditionnelles et inédites d’Afrique – masques d’une forte qualité plastique – et des productions caribéennes : mas, assemblages, photographies, vidéo ». Jusqu’en juillet 2012, le musée accueillera une magnifique collection d’arts d’Afrique et de créations des Caraïbes consacrée aux carnavals.
Comme de très nombreux aspects de la vie culturelle caribéenne, le carnaval, aujourd’hui événement populaire et incontournable en Martinique, à Trinidad, en Guyane, etc. est un des héritages des pratiques transmises par les esclaves. La contiguïté entre les deux pratiques reste évidente selon l’organisation : « on peut déceler de subtiles résonances : au-delà de leurs spécificités, les mascarades de même que les carnavals mettent en place des manières assez proches d’appréhender le réel, de le subvertir et d’agir sur les comportements des individus. Les sorties de masques dans les sociétés africaines, comme les vidé et les déboulé – les marches en rythme des carnavaliers aux Antilles et en Guyane – toujours accompagnés de musique, constituent des moments forts de la vie des populations ».
À travers une centaine d’œuvres, « Mascarades et carnavals » fera le lien entre les sorties de masques des sociétés africaines et les mas que l’on peut retrouver dans les Caraïbes. On partira du masque qui entre dans les rituels de la transmission des connaissances, qui emprunte à l’esthétique animale et joue un rôle significatif dans l’éducation, en faisant par exemple des guerriers. En Angola, au Nigeria ou encore au Cameroun, la présence des masques dans les rituels, leur fabrication réglementée et codifiée, l’identité de celui auquel il se destine et les cérémonies qui accompagnent les différents moments de la vie où interviennent les masques, en font un univers riche et complexe qui reste à découvrir dans cette exposition. La liaison entre les œuvres originelles d’Afrique et les créations caribéennes, comme entre l’ejumba porté en Casamance lors d’une initiation traditionnelle et celui arboré par le Diable rouge qui fait sa sortie durant les jours gras à Fort-de-France ou à Cayenne.
Le regard d’Hervé Beuze et l’objectif de Zak Ové
L’exposition révélera par ailleurs le caractère inventif qui renaît en saison carnavalesque dans la Caraïbe sous l’influence de Vaval. « Cet univers de la performance sera également évoqué grâce à des photographies et à des vidéos qui révéleront des atmosphères particulières où gestuelle, musique et parole scandent les parades et les défilés. Figure traditionnelle du carnaval antillais et guyanais, Vaval occupera une place privilégiée dans l’exposition : c’est à travers lui que s’expriment, sur le mode de la dérision, les préoccupations et les revendications sociales, politiques des citoyens. Réalisant depuis plusieurs années le gigantesque Vaval de Fort-de-France, le plasticien Hervé Beuze a créé pour le musée Dapper ce personnage emblématique sous la forme d’une installation ».
Le choix de l’artiste martiniquais pour la création d’un Vaval pour cette exposition trouvant, entre autres, sa justification dans le fait qu’il « puise son inspiration dans les arts de l’Afrique » tout en maintenant une démarche artistique en lien avec le monde actuel : « la nature non respectée se révolte, créant réchauffement climatique, séismes et disparition de populations ». La transformation d’une création destinée au carnaval en outil de médiatisation d’une idée ou d’une cause entrant bien dans la traditions caribéenne de cet pratique populaire.
Zak Ové, lui aussi, a trouvé dans le carnaval, rendez-vous populaire de son pays, Trinidad, le moyen d’exprimer sa créativité. Il met en lumière des personnages du carnaval caribéen représentations chimériques ou simplement fantaisistes qui font la carnaval caribéen. « Il met en scène des êtres à l’allure fantasmatique dont on ne sait s’ils sont inspirés d’un rêve ou s’ils appartiennent véritablement à un défilé carnavalesque… Mais l’artiste ne fait que souligner des codes qui structurent le carnaval, en tant que pratique sociale et artistique ».
Le musée Dapper proposera en marge de cette exposition des projections et conférences débats en lien avec l’événement : le documentaire de Geneviève Wiels, Carnaval, antan lontan ; le film de Marcel Camus, Orfeu Negro et l’occasion de s’interroger avec des experts et spécialistes sur le Carnaval : transformations et renouvellements de la fête à travers le temps et les continents et Les masques en action. Un ouvrage accompagne également l’exposition qui sera inaugurée le 4 octobre, réalisé sous la direction de Christiane Falgayrettes-Leveau, commissaire de l’exposition. Il évoque, entre autres, les aspects des rituels et des carnavals tel qu’ils sont vécus et perpétués dans les Caraïbes. Au sommaire de cette publication, Mas et rites de Guadeloupe : un carnaval contestataire, de l’anthropologue Christian Cécile, également auteur de Carnaval de Guyane – Musiques, danses et personnages avec Jérôme Nicolas, qui apparaît au sommaire ce même ouvrage. Le carnaval de Trinidad – jeux de masques et mascarades, de Florabelle Spielmann et Identité et parodie dans le carnaval de Martinique, de Véronique Rochais et Patrick Bruneteaux comptent au nombre des auteurs de ce livre.
Renseignements pratiques
Mascarades et Carnavals
5 octobre 2011 au 15 juillet 2012
Musée Dapper
Ouvert tous les jours, sauf le mardi et le jeudi, de 11 h à 19 h
Tarif exposition : 6 euros
Tarif réduit : 4 euros (seniors, familles nombreuses, enseignants, demandeurs d’emploi)
Gratuit : Les Amis du musée Dapper, les moins de 26 ans, les étudiants et le dernier mercredi du mois
Mascarades et Carnavals, paru aux Éditions Dapper
Ouvrage collectif, sous la direction de Christiane Falgayrettes-Leveau (directeur du musée Dapper), avec la collaboration scientifique de
Michel Agier (ethnologue et anthropologue, directeur de recherche à l’IR D et directeur d’études à l’EHESS)
Broché : 33 euros
Relié sous jaquette : 40 euros