Terre à terre, le magazine de l’environnement de Ruth Stégassy, programmé chaque samedi de 7 h 05 à 8 h sur France Culture, reçoit cette semaine le botaniste Francis Hallé. Auteur de La condition tropicale : une histoire naturelle, économique et sociale des basses latitudes publié au début du mois de février aux éditions Actes Sud, il défend une conception des basses latitudes à rebours des analyses actuelles.
Ces régions, explique l’éditeur en quatrième de couverture, qui ont à ses yeux une importance bien supérieure à celle qu’habituellement on leur concède, constituent pour la planète tout entière une référence, un berceau, un moteur. Cette position, qui va de soi dans de nombreux domaines – climat, biologie, diversité ethnologique, maladies, techniques agricoles… -, conserve toute sa pertinence en économie : avant d’être colonisées, les populations tropicales ne respectaient-elles pas l’environnement mieux que ne le font aujourd’hui les pays riches, victimes de leur surdéveloppement ?
La question ici en jeu, rarement soulevée, est donc d’ordre planétaire : c’est celle de l’inégalité économique entre les tropiques et les latitudes tempérées. Pour tenter d’y répondre, et après avoir dénoncé les contre-vérités des ignobles et tenaces théories racistes, l’auteur s’attache à évaluer les facteurs politiques – esclavage, colonisation, néocolonialisme -, mais ceux-ci, recevables pour les périodes récentes, ne permettent pas d’élucider, dans une vaste perspective historique, l’origine de ces inégalités entre les latitudes.
Il avance alors une hypothèse biologique : fondée sur la sensibilité de l’homme aux variations de longueur des jours, celle-ci expliquerait les différences comportementales qui, entre les tropiques et les latitudes tempérées, influencent profondément les structures psychologiques, les progrès scientifiques et les constructions sociales.
Face aux dérèglements actuels – changement climatique, montée du niveau des mers, déforestation tropicale, pollution, érosion de la biodiversité, épuisement des ressources, pénurie d’eau potable -, face aux réflexes colonisateurs attisés par la mondialisation et à la survivance du racisme, il est urgent de mettre au cœur du débat cette « condition » de l’homme tropical.