Cette semaine, France Culture consacre plusieurs émissions Sur les docks à la Martinique et à la Guadeloupe. Quatre documentaires proposés la semaine où comme chaque année est commémorée l’abolition de l’esclavage, le 22 mai en Martinique et le 27 mai en Guadeloupe.
La série a commencé avec « Promenade antillaise » (Samy Simon et Abder Isker) et « Martinique, terre d’hommes cassés » (Fabienne Kanor, Véronique Kanor et François Teste) que vous pouvez réécouter sur France culture. Elle se poursuit jusqu’à jeudi, de 17 à 17 h 55, avec deux documentaires évoquant l’histoire de l’esclavage, ses enchaînements et ses répercussions sur la réalité d’aujourd’hui. Mercredi, dans un documentaire de Meta Tshiteya et Rafik Zenine, il sera question d’identité cette fois à travers le métissage et les rapports qu’entretiennent ceux qui la vivent avec leur terre martiniquaise ou guadeloupéenne. Enfin, jeudi 24 sera diffusé un document avant tout historique, d’Olivier Chaumelle et Nathalie Battus, sur l’expédition « Esclaves oubliés ».
Couleur métisse ou la frontière intérieure, le 23 mai 2012
Comment donc un enfant se construit-il lorsqu’il incarne le point de rencontre de deux mondes, lorsque même les traits de son visage et sa couleur de peau le distinguent non seulement de la société dans laquelle il grandit, des communautés qui l’entourent, mais aussi et surtout de ses propres parents?
Dans leur quête d’équilibre, les enfants métis doivent-ils nécessairement à un moment ou un autre « choisir un camp » ? Selon quels critères et avec quelles conséquences ?
Et comment dans leurs vies d’adultes ces enfants assumeront-ils ce choix, comment noueront-ils des liens sociaux et personnels dans cette conscience aigüe de leur différence ?
Ce sont ces problématiques qui alimentent le débat entre Christophe et ses amis… Pourquoi ce jeune trentenaire, issu d’une famille bourgeoise de la région parisienne, entretient-il avec la Guadeloupe originelle de sa mère des rapports si tendus ?
Et pourquoi Vladimir, avec sa peau blanche, ses cheveux raides et ses yeux verts ressent-il encore, à trente-sept ans, le besoin de justifier et de revendiquer sa créolité ?
Les fils de l’identité sont mé-tissés serrés…
Perdus sur Tromelin – Histoire d’une survie invraisemblable, le 24 mai 2012
La France possède des territoires assez inattendus. La République administre dans l’Océan Indien et le Canal du Mozambique (entre la côte africaine et Madagascar) des cailloux souvent inhospitaliers voire inhabitables, très éloignés les uns des autres, et joliment regroupés sous l’appellation « Iles Éparses ». Selon les latitudes, il y pousse des cocotiers ou des palétuviers. Elles ont pour nom Juan de Nova, Europa, Bassas da India, l’archipel des Glorieuses et Tromelin.
L’île Tromelin est parmi les plus petites de ces possessions dérisoires – mais qui délimitent des zones de pêches de plusieurs centaines de milliers de km2. Elle se situe à l’Est de Madagascar et au Nord de la Réunion, à 470 kilomètres de la première terre émergée… Elle est aride, très peu élevée – cinq mètres au-dessus du niveau de l’océan – et battue par les cyclones. Quatre météos l’occupent en permanence.
Le 31 juillet 1761, le vaisseau négrier français L’Utile, y fait naufrage. Les rescapés, dont une soixantaine d’esclaves malgaches à destination de l’île de France se réfugient sur ce qui s’appelle alors l’île des Sables. La situation semble parfaitement désespérée. On creuse des puits, et par chance, on trouve assez vite de l’eau douce. Le charpentier du navire parvient à réutiliser l’épave et construit une embarcation de fortune. À son bord, les 122 marins français parviennent à quitter cet enfer deux mois après le naufrage, en laissant les esclaves sur place, leur promettant de revenir les chercher un peu plus tard. Ils oublient très vite leur promesse et les Noirs. Ces derniers dépérissent dans l’immense solitude de l’Océan Indien. Quinze ans plus tard, en 1776, le chevalier Maurice de Tromelin aborde l’île malgré le péril que ça représente, et recueille les derniers survivants : sept femmes et un petit bébé. La survie d’un groupe humain dans un endroit aussi ingrat paraît inimaginable. Et de fait, on n’avait jamais très bien compris comment les infortunés esclaves s’y étaient pris. Max Guérout a dirigé en 2006 l’expédition « Esclaves oubliés », à caractère historique et archéologique, qui fait la lumière sur l’organisation qu’il a fallu mettre en place pour se donner des chances de surmonter les périls. L’ordre, la méthode, la chance semblent avoir été, ici encore, les piliers d’un improbable succès.
Sur les docks
Lundi à jeudi, 17 à 17 h 55
sur France Culture