Le festival de théâtre Quatre Chemins d’Haïti fêtera, du 25 novembre au 7 décembre 2013, non seulement ses 10 ans mais aussi sa dernière édition sous la direction du Fokal (Fondasyon konsesans ak libète). Les organisateurs de l’événement qui fait partie de la vie culturelle haïtienne considèrent qu’il est désormais « temps de passer la main ». En 2014, ce sera donc à Guy Régis Jr de prendre le relais pour continuer à faire vivre le festival.
Né de la volonté d’un collectif d’artistes haïtiens et assidûment porté par « Fokal et l’Institut français, avec le soutien inaltérable de Wallonie-Bruxelles International et celui d’autres institutions locales ou internationales, qui variaient selon les années », le festival de théâtre Quatre Chemins va donc poursuivre sa route avec Guy Régis Jr pour directeur artistique en 2014. Une personnalité qui non seulement connait bien le festival, mais dont la notoriété et la créativité permettent de miser sur un essor constant du festival. Il s’agit pour ceux qui ont jusqu’ici présidé à la bonne tenue de cette manifestation de confier les rênes à « cet artiste pluridisciplinaire, inscrit dans la contemporanéité », qui selon eux « sait aussi inviter d’autres créateurs à le rejoindre dans ses projets… Connu en Haïti et à l’étranger, il nous paraît le plus apte à ce rôle de facilitateur dans les échanges nécessaires avec le reste du monde ».
Cette année pas comme les autres verra donc le festival de théâtre Quatre Chemins se distinguer avec une programmation axée sur le thème du pouvoir, les organisateurs ayant mis l’accent sur l’innovation et l’interdisciplinarité en espérant des participants et artistes « des créations non traditionnelles, dans des lieux non traditionnels ».
Spectacles, lectures et performances au programme
Du 25 novembre au 7 décembre 2013, spectacles, débats et table ronde se succéderont à Port-au-Prince. À partir du lundi, ce sera à chaque jour son programme de danse, de rencontres, d’échanges avec le public ou encore de lectures imprévues, comme le propose une programmation de choix.
Les trois premiers jours seront marqués par le spectacle de danse « Bat au pas », un spectacle mis en scène par Aude Hulot, conçu et chorégraphié par Dedley Aurephar et Woulele Marcellin, tous deux respectivement membres et responsables des compagnies Let’s dance et Swit Djakata qui officieront pour ce premier spectacle inscrit à l’agenda du festival. Le spectacle mettra en vedette le pays Haïti à travers les personnages de Louzie. Pour respecter l’appel à projets des organisateurs, « ‘Bat au pas’ questionne et englobe à la fois la déclinaison de la violence sous toutes ses formes : de l’Histoire sur le présent, de la société sur l’individu, des relations de genres, des habitudes, des références… Métissage mêlant des rythmes de tambours à la danse contemporaine hip-hop, ‘Bat au pas’ interroge la notion de pouvoir sous différents angles ».
Des textes écrits et lus par Valère Novarina composeront un autre des moments forts du festival. L’auteur dramatique suisse sera à l’Institut français en Haïti avec L’espace furieux et d’autres textes. L’Espace furieux, une création de janvier 2006, « raconte comment le verbe se fait chair et comment il agit parmi nous. Histoire essentielle pour les comédiens et fascinante pour tous ceux qui croient au pouvoir de la parole ». Valère Novarina, invité de l’École Nationale des Arts, rencontrera pour l’occasion Franketienne le mercredi 4 décembre 2013 à la Fokal à partir du 17 h.
Parmi les rendez-vous à ne pas manquer, celui fixé quotidiennement par E-Pouvoir, une installation multimédia qui prendra place sur le parvis de la Fokal, du lundi 25 novembre au samedi 7 décembre, une structure née de la collaboration entre une dizaine d’artistes haïtiens. Ils sont plasticien, poète, spécialiste des arts graphiques ou des lettres, technicien de l’image ou du théâtre et ont contribué à concevoir leur vision de l’E-Pouvoir. Résultat : « une expérience artistique et esthétique où se côtoient arts visuels et arts vivants et qui travaille sur la relation entre l’esthétique et le pouvoir. E-Pouvoir rend visible le tramage (tissage) de deux réalités, considérées le plus souvent comme distinctes : l’esthétique d’un côté et le pouvoir de l’autre, dont les effets sont difficiles à mesurer dans notre société ». De plus, la structure accueillera chaque jour des comédiens pour donner lecture de textes sur le pouvoir.
HI Femmes et pouvoir, programmé pour deux représentations par soirée (6 jours durant le festival), exprimera autrement le thème du pouvoir avec une performance qui propose « une réflexion scénique sur certaines dynamiques sociales entre femmes et pouvoir en Italie, dans un contexte marqué par des problématiques diamétralement opposées à celles d’Haïti ». Autre performance qui allie femme et pouvoir : Illusion. Spectacle dans lequel une jeune fille abandonnée s’interroge sur son identité et son origine.
Toréadors, Kafou Twakwa, ou encore MO font aussi partie d’une programmation à laquelle se mêlent spectacle en chantier, théâtre de rue et multimédia. Pour résumer, le festival fait valoir une ambition évidente avec des créations qui associent « temps passé ou futur, dans des espaces réels ou imaginaires, avec des propositions de spectacles réalistes, fantastiques ou merveilleux, avec des histoires réelles ou inventées, avec ou sans texte… »
2013, année d’un bilan
L’édition 2013 et la fin de ce cycle offriront l’occasion d’un bilan décennal. Il s’agira aussi d’envisager le futur du festival, au cours de la table-ronde intitulée 10 ans de festival : bilan et perspectives, à laquelle prendront part Guy Régis Jr et la la comédienne Caroline Berliner. Outre les spectacles et performances artistiques, ce rendez-vous s’annonce comme une occasion de mesurer les ambitions des créateurs, de divers acteurs de la vie culturelle haïtienne et de ceux qui veulent continuer à prendre part à son animation. « Quatre Chemins doit être l’espace rêvé des créateurs pour se remettre en question, ouvrir leur esprit, exprimer leurs doutes, leurs questions » estiment les partenaires du festival », prévoyant notamment « une consultation sur l’avenir du festival et sur le futur de la création théâtrale en Haïti sous la forme de journées de réflexion. Cette consultation donnera lieu à des échanges entre artistes de théâtre et d’autres intervenants issus de différentes disciplines artistiques, pour mettre sur pied des chantiers pour l’avenir ».