« En marge du Cahier », pièce inspirée du « Chemin d’école » de Patrick Chamoiseau, poursuit son plan de route à la rencontre du public, avec cette fois une halte à la Purgerie du Domaine de Fonds Saint-Jacques à Sainte-Marie, en Martinique, pour une représentation le 10 mai à partir de 19 h.
Dans cette libre adaptation du « Chemin d’école » de Patrick Chamoiseau, Laurence Couzinet-Letchimy met en scène Jean l’Océan. Artiste chorégraphe, Laurence Couzinet-Letchimy est l’une des créatrices avec Thierry Sirou de la compagnie Car’Avan, par le biais de laquelle elle rencontre en 2006 Jean l’Océan, comédien et conteur. Dès 2007, on les retrouve sur scène dans « Pas un ange… un enfant, simplement ! » et périodiquement dans un travail commun sur les Contes de la Caraïbe (Les trois pitons, L’ilet aux sorcières, Les yeux dorés de Rose, etc.). Avec « En marge du Cahier », ils prolongent un travail de création où le mouvement et l’expression du corps rencontrent l’interprétation et la parole du conteur, pour investir et porter le texte de Chamoiseau. La pièce, qui a déjà retenu l’attention du public sur plusieurs scènes depuis 2010, appelle « par ici de nouvelles coupes, par là des échappées pour établir un pont avec le public ». Une création où le public tient un rôle : ainsi, sous l’influence de Laurence Couzinet-Letchimy, elle « crée de l’espace et ose toutes les formes envisageables : marionnettes, détournement d’objets, représentations symboliques, esprit du conte, chorégraphie ou jeu théâtral, chant… apportant aux mots de Patrick Chamoiseau des images nouvelles quoique respectueuses, des libertés inattendues dans lesquelles le public peut s’engouffrer pour bâtir son propre ressenti ». L’esthétique du conteur qui « joue avec les sons et les mots pour frapper les imaginaires », le rythme et le mouvement des mots et de la musique prennent pleinement part à la composition audacieuse de cette création.
« En marge du Cahier« , de la compagnie Car’Avan
Ce texte, Chemin d’École, est propre à se faire une idée historique de ce qu’était, dans les années 1960, l’école coloniale (déni du créole, sur-valorisation de la « culture-France », amnésie de son histoire…) et, par contraste, permet de mesurer son évolution et tous les avantages qu’elle offre désormais.
Par ailleurs, ce récit retrace aussi la genèse d’un écrivain. L’on y voit Patrick Chamoiseau – enfant, qui en dépit d’un enseignement où il ne se reconnaît pas, reste toutefois éminemment actif et acteur de son propre destin. Sa capacité à s’émerveiller, à s’étonner, à absorber, à apprendre, sa farouche envie d’ « aller » et de découvrir le tenaille au corps et ne le quitte pas.
Sa délicieuse et inextinguible appétence à vivre s’empare de la matière transmise par le maître d’école. L’enfant joue et, pareil à un sculpteur, il malaxe cette matière comme terre glaise et, ce faisant, génère un espace imaginaire & un monde à sa mesure. L’enfant-acteur deviendra, on le sait, cet écrivain-créateur, récipiendaire du prix Goncourt en 1992 pour son roman Texaco.
Le négrillon recomposait les livres à partir des images. Il imaginait des histoires et s’efforçait de les retrouver dans les textes imprimés, toujours indéchiffrables. Il apprit à amplifier un événement pour qu’il corresponde au nombre de lignes d’une page. On eut l’impression qu’il faisait mine de lire ; en fait, il lisait ce que sa délirante imagination y projetait. Penché sur ses pages d’écriture, il vivait de vrais bonheurs. La lettre qui naît, qui se ferme et emprisonne son sens, la refaire, la voir naître autrement… [extrait].
En assistant à ce spectacle, les spectateurs auraient l’occasion d’entrevoir ce que peut être une adaptation d’une œuvre littéraire qui, a priori, n’avait nulle vocation à être représentée au théâtre.
« En marge du Cahier » – Purgerie du Domaine de Fonds Saint-Jacques à Sainte-Marie, en Martinique
Samedi 10 mai 2014 – 19 h
Tarif plein : 8 euros
Tarif réduit : 5 euros (enfants, étudiants, demandeurs d’emploi)