Le TNP (théâtre national populaire) de Villeurbanne, en région Rhône-Alpes, présentera à partir du mardi 14 mai la pièce de Aimé Césaire, Une Saison au Congo, sur une mise en scène de Christian Schiaretti. Un nouvel événement célébrant le centième anniversaire de la naissance du poète martiniquais.
Une Saison au Congo est la seconde pièce du triptyque de Aimé Césaire qui porte sur « le drame des nègres dans le monde moderne » (selon Roger Toumson dans Aimé Césaire dramaturge : le théâtre comme nécessité). Après La Tragédie du roi Christophe (le volet antillais, 1963) et avant La Tempête (le volet américain, 1969), Une Saison au Congo explore le volet africain de cette tragédie et révèle les derniers mois de la vie de Patrice Lumumba, père de l’indépendance du Congo. Aimé Césaire écrit une part de l’histoire de l’Afrique et de ses peuples à travers celle de l’homme Lumumba, il y exalte la force du « poète visionnaire » et la portée de son discours politique. Une dimension qui a convaincu Christian Schiaretti, lui-même « attaché à la puissance du verbe et à la dynamique des idées », de se placer, en tant que metteur en scène, « en sympathie profonde avec l’écriture et la pensée de Aimé Césaire, pour qui le verbe était ‘une arme miraculeuse' ».
La pièce créée par le TNP se veut « une aventure basée sur l’échange, l’ouverture et un travail collectif » et satisfait cette ambition de diverses manières avec Marc Zinga dans le rôle de Lumumba, aux côtés d’une trentaine de comédiens issus de trois entités différentes, dont un collectif burkinabé ; des compositions originales du pianiste et compositeur Fabrice Devienne ; des transmissions programmées sur France Culture et France Ô. Daniel Maximin prend lui aussi part à cette aventure, dans le rôle de conseiller artistique et dramaturgique. L’écrivain guadeloupéen se fait complice de Christian Schiaretti sur ce projet apportant la connaissance qu’il a de l’écriture de Césaire et de ses pièces où selon lui « défilent une galerie de bâtisseurs ni dieux ni diables, manifestant lucidement la renaissance de la tragédie sur les ruines de l’histoire pour l’enracinement de la liberté : ‘invincible, comme l’espérance d’un peuple… comme la racine dans l’aveugle terreau’. »
Autour de la présentation de la pièce, qui s’étendra du 14 mai au 7 juin 2013, puis du 17 au 26 octobre 2013 au théâtre national populaire, sont fixés d’autres rendez-vous liés à la présentation de la pièce d’Aimé Césaire. Dès le 15 mai, la Maison du Livre de l’Image et du Son de Villeurbanne proposera une soirée hommage à Aimé Césaire à partir de 19 h, au cours de laquelle seront entre autres programmées des « lectures à partir de textes de Patrick Chamoiseau, Édouard Glissant et Ernest Pépin, ainsi que des poésies et des extraits de Une Saison au Congo, et d’autres essais d’Aimé Césaire ». Par ailleurs, le samedi 18 mai à partir de 17 h, ce sera à Daniel Maximin de réunir le public autour de la pièce d’Aimé Césaire : le « dramaturge de la création Une Saison au Congo convie à un voyage au cœur de l’œuvre et de la vie de ce grand poète martiniquais ».
La pièce (selon Dany Toubiana)
Nous sommes au Congo belge en 1958 lorsque la pièce débute, c’est une période d’effervescence qui va mener le pays à l’indépendance.
Une fois celle-ci acquise se font jour les oppositions et les diverses pressions pour l’acquisition d’une parcelle du pouvoir. Les colonisateurs, qui semblent avoir quitté la scène politique, attisent les dissensions et tentent encore de conserver le pouvoir économique au besoin en encourageant la sécession du Katanga, une des provinces congolaises. Patrice Lumumba, nommé premier Ministre, dénonce ces malversations. L’atmosphère de liberté et de luttes politiques fiévreuses pour la conquête de l’indépendance, puis l’ascension de Patrice Lumumba, sont le sujet de la pièce de Césaire.
Un héros au temps compté, un chemin semé d’embûches, une mort violente et prématurée, tout est là pour créer à la fois le mythe politique et théâtral. À partir de ces faits politiques précis, et à peine transformés, Césaire transfigure la réalité pour faire de Lumumba une figure charismatique à la lucidité exaltée, symbole de toute l’histoire d’un continent.
Loin des « héros positifs » du réalisme socialiste surgissant dans les théâtres de nombreux pays africains qui deviennent indépendants dans les années 60, Lumumba, comme Césaire, est un poète « déraisonnable ». Figure de Prométhée, porteur de feu ou Christ souffrant, l’unité Dieu/homme est ici transformée en Afrique/Lumumba. Le temps de la pièce constitue à la fois un espace et un temps prophétiques ; d’une certaine façon le poète sera l’instrument et la mémoire de cette prophétie.
Une Saison au Congo de Aimé Césaire
Du 14 mai au 7 juin 2013
Mise en scène Christian Schiaretti
Théâtre National Populaire (8 Place Lazare-Goujon – 69627 Villeurbanne cedex)
Lecture-concert, en collaboration avec la Compagnie Persona
Mercredi 15 mai 2013, 19 h
Maison du livre, de l’image et du son (247 cours Émile-Zola – 69100 Villeurbanne)
Rencontre avec Daniel Maximin
Samedi 18 mai à 17 h
Théâtre National Populaire (8 Place Lazare-Goujon – 69627 Villeurbanne cedex)