Dans le cadre de la commémoration de l’esclavage et de ses abolitions, les antennes du pôle Outre-mer de France Télévisions proposeront une programmation spéciale sur le thème du « Temps des Mémoires 2023 » au mois de mai.
Le mois de mai, période de commémoration de l’esclavage et de ses abolitions, sera marqué sur les antennes de France Télévisions et du pôle Outre-mer par la diffusion de plusieurs documentaires (plusieurs inédits) et édition spéciale, dont la retransmission en direct de la cérémonie de commémoration de l’abolition de l’esclavage et de la traite.
Direct et éditions spéciales en TV et en radio
En télévision (sur les chaînes du Réseau La 1ère et La1ere.fr)
Mercredi 10 mai : édition spéciale et retransmission en direct de la cérémonie de commémoration de l’abolition de l’esclavage et de la traite. Thierry Belmont (journaliste de la rédaction de Malakoff) recevra en plateau des invités pour apporter leur éclairage sur la transmission de la mémoire de l’esclavage dans la société française. Des sujets en Outre-mer et dans l’Hexagone seront diffusés au cours de l’émission et viendront compléter la diffusion de la cérémonie officielle pour la commémoration du 10 mai.
En radio : à l’occasion de la Journée nationale des mémoires de la traite, de l’esclavage et de leurs abolitions, France Télévisions, en collaboration avec RFI, mobilise ses rédactions pour une émission spéciale en direct mercredi 10 mai, de 19h10 à 20h (heure Paris), co-présentée par Tiziana Marone (pôle Outre-mer de France Télévisions) et Anne Corpet (RFI), autour des traites et esclavages dans l’océan indien.
Côté documentaires
Origine : Kongo, de Laura Chatenay-Rivauday, le 8 mai : sur France 3, La1ere.fr et les chaînes du Réseau La 1ère
Entre 1854 et 1864, après l’abolition de l’esclavage, plus de 18 500 femmes, hommes et enfants de plusieurs pays d’Afrique sont envoyés aux Antilles pour y travailler la terre. Appelés « Kongos », ces travailleurs étaient pour la plupart des « captifs rachetés » par des recruteurs qui leur imposaient un contrat de travail, dit « engagement », dans des plantations de canne à sucre en Martinique ou en Guadeloupe. Les travailleurs Kongos furent une main-d’œuvre servile, dont les employeurs s’efforçaient à n’être pas accusés d’esclavagisme, dans le contexte abolitionniste de la première moitié du XIXe siècle. Aujourd’hui, en Martinique et en Guadeloupe, leurs descendants retracent cette mémoire méconnue et revendiquent leurs racines africaines.
Dans ce documentaire, chaque protagoniste aborde ses origines kongos de façon différente. Chacun se réapproprie son histoire et prend la liberté de se définir a posteriori, comme un pied de nez à la servilité imposée à leurs ancêtres. Certains portent un nom africain, d’autres n’ont pas la certitude de la filiation qu’offre un document généalogique et revendiquent pourtant un patrimoine « kongo » qui les accompagne au quotidien. D’autres encore ont des héritages et des expériences exceptionnels, comme la famille Massembo en Guadeloupe qui, de génération en génération, perpétue des pratiques ancestrales en mémoire de leurs aïeux africains lors d’une cérémonie appelée le grap a kongo.
Durant son enfance, le nom de famille de Sylvianne et sa couleur de peau étaient moqués. Devenue adulte, à travers son amour pour les rythmes des tambour bèlè hérités des esclaves et les chansons d’artistes africains qu’elle apprend, Sylvianne se réapproprie petit à petit ses origines africaines.
Agriculteur dont la famille est originaire du Morne Congo, au centre de la Martinique, Eric estime qu’aimer la terre lui vient de ses ancêtres « arrachés là-bas et ré-enracinés ici ». L’homme produit des fruits et légumes sans intrants, selon les codes du jardin créole qui permettaient aux esclaves de se nourrir.
Il se dit, dans la famille paternelle de Vanessa, qu’un « homme Kongo se serait allié à [son] aïeule », dans le sud de l’île après l’abolition de l’esclavage. Même s’il n’y en a pas de trace dans leurs archives personnelles, il existe pourtant dans le récit familial. Pour elle, « Kongo » ne renvoie pas au pays actuel avec ses frontières récentes mais plutôt à un sentiment d’appartenance à une terre d’un autre continent.
Bernard est originaire de Marie-Galante en Guadeloupe. Après des recherches sur la généalogie familiale, il ajoute au nom de son père le patronyme kongo de sa mère. À ses yeux, l’Afrique est avant tout symbole d’une force spirituelle. Le documentaire le suit en République du Congo où il découvre le village de ses aïeux et rencontre des anciens.
Marie-France a vu sa mère et sa grand-mère avant elle se battre pour organiser la cérémonie du grap a kongo, un rituel congolais dédié aux ancêtre dont l’organisation se transmet de mère en fille. Chaque 1er novembre, sa famille honore ses défunts, avec notamment des chants en langue kikongo* qui ont traversé les siècles. D’abord l’objet d’un préjugé défavorable, au fil des années, Marie-France est parvenue à faire inscrire cette célébration dans le paysage culturel de la Guadeloupe.
Plasticien, Joël explore dans ses œuvres ses racines kongos et, plus largement, la condition de l’homme noir. Au cours de son enfance à Marie-Galante, sa grand-mère lui a toujours répété avec fierté qu’elle était Kongo et que les Kongos étaient des travailleurs libres. « Ils n’étaient les esclaves de personne. »
Le documentaire de Laura Chatenay-Rivauday revient sur le processus de la transmission de la culture à l’instar des descendants des Kongos qui s’efforcent de garder vivante, 150 ans plus tard, la mémoire de leurs ancêtres. Ces femmes et ces hommes apparaissent ici comme les gardiens du lien entre l’Afrique et la Caraïbe.
Ziskakan, une révolution créole, le 11 mai 2023 : sur France 3 le lundi 1 mai à 23.40 et sur La1ere.fr
Premier documentaire réalisé par Sébastien Folin, coup de cœur de l’Académie Charles Cros 2023, Ziskakan, une révolution créole raconte le combat identitaire et pacifique mené par les membres du groupe réunionnais Ziskakan depuis quatre décennies pour la valorisation et la transmission de la culture créole de leur île. Un film important qui porte la mémoire d’un pan méconnu de l’histoire de La Réunion. Aujourd’hui, que reste-t-il de leurs actions ? Où en est le patrimoine culturel de La Réunion et la langue créole à l’heure de la globalisation ? Pour sublimer leur histoire authentique et unique, le documentaire est conté par Abd al Malik. (…)
Dans les années 1970, la langue créole et ses avatars culturels étaient absents de l’espace public et dévalorisés par le pouvoir politique. Pour contourner la censure, des concerts clandestins et les fanzines distribués sous le manteau ont participé à la naissance d’un mouvement dont le ciment a été une solidarité sans faille. Pour la première fois, cette jeunesse réunionnaise racontait sa réalité et dessinait un portrait sans artifice de La Réunion. Une lutte que les membres de Ziskakan ont menée sur le terrain de la parole, à travers les contes, les poèmes et les chansons.
L’héritage de Ziskakan est certes culturel, mais c’est aussi un encouragement à lever la tête et à éteindre la honte qui étouffe, malheureusement, trop souvent les envies d’émancipation et d’élévation sociale de la jeunesse. Depuis ses débuts, le groupe a fait découvrir à un public de plus en plus large une musique à l’image de la richesse culturelle de La Réunion (musiques indiennes, percussions africaines, textes créoles) et a aussi participé à révéler au monde les forces et la portée de cette culture.
Quarante-trois ans après la création du collectif, Sébastien Folin est parti à la rencontre de ceux qui ont fait l’histoire de Ziskakan. Dans ce documentaire intégralement tourné en créole réunionnais, les membres du groupe témoignent et nous brossent un portrait touchant et sans concession de La Réunion postcoloniale où ils ont évolué.
Aujourd’hui, alors que le groupe a fait le tour du monde, que le maloya est classé depuis 2009 au Patrimoine culturel immatériel de l’humanité certifié par l’Unesco, et le créole enseigné à l’école, le film interroge ces pionniers sur leurs motivations, leur histoire et leur héritage. Avec de nombreuses archives collectées, le film est autant l’histoire d’un mouvement artistique que celle de la quête identitaire d’un bout de France de l’océan Indien.
À découvrir ou à revoir sur les chaînes du réseau La 1ère et La1ere.fr
La voix des sans voix, réalisé par Valérie Patole
À travers trois générations de femmes, celles de Gabrielle, Tess et Marie, La voix des sans voix raconte les migrations vers la Martinique, de la période post-abolitionniste à aujourd’hui.
Cette série web-documentaire dévoile les recherches des familles sur leur passé et le récit qu’elles en font. Une transmission transgénérationnelle, grâce aux témoignages longtemps restés enfouis dans les mémoires, qui nous révèlent un socle commun, celui de la construction d’une identité collective.
Les instruments de l’espoir à la synagogue Emanu-El (New York), de Arnaud Legoff
Tout proche de nous, la Shoah : durant la Seconde Guerre mondiale, dans les camps de concentration, l’Allemagne nazie procède à l’extermination de six millions de Juifs. Les victimes ont une volonté commune : rester dans nos mémoires. Afin de ne pas être oubliées, ces victimes laissent des témoignages en écrivant des poèmes, des journaux et des chansons. Ce faisant, elles nous passent le témoin.
À travers ce concert, les témoignages des victimes sont portés et transmis. Un pas en avant pour que l’Histoire reste en mémoire.
Chaînes de mémoires, de Gérard Maximin
Chaînes de mémoires propose de rencontrer les militants d’hier et d’aujourd’hui dans leur combat pour la reconnaissance de la mémoire de l’esclavage. Qu’il s’agisse d’œuvres d’art, de monuments, d’actes symboliques ou de textes de loi, ces hommes et ces femmes ont laissé des traces tangibles dans l’espace public. Un héritage qui se transmet de génération en génération, comme les maillons d’une chaîne qui ne se brise jamais.
Jean-Jacques Dessalines, le vainqueur de Napoléon Bonaparte, Arnold Antonin
Dessalines est le principal fondateur d’Haïti et le vainqueur de l’armée de Napoléon Bonaparte avant Waterloo. Il a été assassiné deux ans après la proclamation de l’indépendance et fut objet d’une damnatio memoriae, une condamnation post-mortem à disparaître sans laisser de traces pendant quarante ans. Aujourd’hui, alors qu’en France on occulte encore son épopée, en Haïti il est devenu une figure mythique, utilisée pour le meilleur et pour le pire. Ce film restitue Jean-Jacques Dessalines dans toute sa complexité et ouvre un débat sur les crises haïtiennes et l’héritage colonial.
Saint-George, le Mozart noir, réalisation José Bakonga
Compositeur, violoniste, chef d’orchestre et escrimeur, le chevalier de Saint-George fut l’une des personnalités les plus brillantes et les plus célèbres du XVIIIe siècle en France et en Europe. Grand homme des Lumières mais aussi militaire, il participa activement à la Révolution française. À travers l’engagement d’étudiants lillois mobilisés pour faire rebaptiser une place de la ville à son nom, ce documentaire nous fait découvrir la personnalité et le parcours de cet homme exceptionnel.
L’esclavage au cinéma, la fin d’un tabou ?, une réalisation de Régis Dubois
S’il existe aux États-Unis de nombreux films de cinéma qui traitent de la question de l’esclavage, depuis La Case de l’oncle Tom (1903) en passant par Naissance d’une nation (1915) jusqu’à Antebellum (2020), en France, la plupart des spectateurs et téléspectateurs ne peuvent citer qu’un seul long-métrage français sur le sujet : Case Départ (2011). Comment expliquer un tel décalage ? Pourquoi existe-t-il si peu de films chez nous ? Pourquoi a-t-on tant de mal à représenter cette partie de notre passé ? Peut-on parler d’un « tabou » français ?
Mon nom est Solitude, de Aurine Crémieu
« La Mulâtresse Solitude » est un personnage historique devenu une figure mythique des Antilles. Sa statue domine aujourd’hui le boulevard des Héros à Pointe-à-Pitre, une autre lui fait écho place des Libertés à Bagneux, son buste trône également au-dessus du siège de Victor Schoelcher au Sénat. Le documentaire propose de découvrir l’histoire de cette esclave marronne de Guadeloupe à peine signalée en quelques lignes par un historien lors des combats de 1801 et devenue le symbole de la lutte contre l’esclavage à travers les textes d’André, puis de Simone Schwarz-Bart.