Noir sur blanc – Voyage en Allemagne, un documentaire de Pagonis Pagonakis et Susanne Jäger à voir sur Arte le mardi 25 janvier dans le cadre d’une soirée thématique sur le racisme. Le documentaire sera suivi d’un débat, présenté par Thomas Kausch, avec la participation de l’auteur du journaliste Günter Wallraff.
Le racisme au quotidien
Trente ans après s’être glissé dans la peau d’un immigré turc en Allemagne, Günter Wallraff s’est fait passer, une année durant, pour un Somalien. Un document impitoyable, qui montre combien le racisme ordinaire reste enraciné dans nos sociétés.
Vingt-cinq ans après la publication de son livre Tête de Turc, qui dénonçait la xénophobie de la société allemande d’alors, Günter Wallraff se lance dans une nouvelle aventure et décide de se glisser dans la peau d’un Africain. Pendant une année et à l’aide d’une caméra cachée, Günter Wallraff, alias l’immigré somalien Kwami, traverse l’Allemagne et révèle les nouveaux visages du racisme. Que ce soit à la recherche d’un appartement, dans le métro, devant une boîte de nuit, parmi des supporters d’une équipe de foot à la sortie d’un match ou d’un club de randonneurs, le constat qu’il tire de cette nouvelle expérience n’est guère réjouissant : « Lorsque j’ai commencé mon travail, il y a quarante ans, je n’étais pas le seul à espérer un lent progrès vers plus d’humanité et plus de justice. Si je continue à me battre par mes reportages et mes livres, je suis de plus en plus saisi par le doute. Nous avons subi, ces derniers temps, trop de revers : l’injustice a progressé, les conditions de vie ne sont pas devenues plus humaines, bien au contraire. »
A propos Günter Wallraff
Journaliste célébrissime outre Rhin, Günter Wallraff s’est spécialisé dans la dénonciation des grands scandales politiques, économiques et médiatiques. Sa technique : se déguiser et infiltrer le milieu sur lequel il enquête…
Né le 1er octobre 1942 à Burscheid près de Cologne, Günter Wallraff commence à décrire ses expériences comme ouvrier dans les grands entreprises allemandes dans la revue syndicale Metall. Puis en 1966, avec la parution de son livre Industriereportagen (reportages industriels), Wallraff se fait un nom en Allemagne. Cependant, son engagement ne se limite pas au territoire allemand. En 1974, il proteste activement contre la dictature militaire en Grèce et au Portugal, et se fait arrêter et torturer par la police politique à Athènes.
En 1977, Wallraff travaille quatre mois sous le nom de « Hans Esser », journaliste à la Bild-Zeitung à Hanovre. Dans son livre Le Journaliste indésirable, il décrit son expérience à la rédaction du tabloïd le plus lu d’Allemagne, dont les méthodes d’investigation bafouent très souvent la vie privée. La Bild-Zeitung poursuit Wallraff en justice. Le laborieux recours en justice qui s’en suit, aboutit en 1983 devant la Cour constitutionnelle fédérale par un jugement en faveur du journaliste.
Dès 1983, Wallraff se crée une identité de travailleur turc, Ali Levent Sinirlioglu, prêt à faire tout travail (entre autres, il travaille quelques mois pour l’entreprise sidérurgique Thyssen, chez McDonald et comme cobaye humain pour les entreprises pharmaceutiques). Il raconte dans le livre Tête de turc sa descente aux enfers, les brimades, les conditions de travail épouvantables que subissent les travailleurs turcs immigrés en Allemagne. Ce livre est un grand succès, vendu à plus de cinq millions d’exemplaires en langue allemande et traduit dans 35 langues. Une grande partie des recettes est consacrée à des associations humanitaires.
Son engagement le conduit aussi à se lier avec l’auteur britannique Salman Rushdie et à le cacher chez lui un certain temps.
En septembre 2003, il est attaqué en diffamation par le groupe de presse Springer comme collaborateur de la Stasi. Wallraff porte plainte contre Springer et gagne le procès. Le tribunal de Hambourg juge qu’au vu des documents présentés par Springer, il n’y avait aucune preuve des accusations portées.
Son dernier livre, Parmi les perdants du meilleur des mondes (Éditions La Découverte), paru en France en mars 2010, reprend différentes enquêtes : toujours sous une fausse identité, Wallraff décrit, entre autres, le quotidien des SDF des grandes villes allemandes l’hiver, les conditions de travail des employés de centres d’appel dans une grande boulangerie industrielle, la privatisation de la Deutsche Bahn et son expérience dans la peau d’un noir…