Depuis le 11 juillet, la chaîne 13e Rue diffuse 50 ans de faits divers dans les Dom. Dans ce cadre, plusieurs événements dramatiques qui ont fait l’actualité dans les territoires d’outre-mer sont passés en revue. Martinique, Décembre noir reviendra le 1er août sur les événements de décembre 1959 et, le lundi 15, Guadeloupe, mai 67 un massacre oublié, concernera les drames de mai 1967 en Guadeloupe.
Après la Guyane, Mayotte ou encore la Nouvelle-Calédonie au mois de juillet, le mois d’août verra évoquer des affaires qui ont très vite pris une dimension politique et marqué de façon définitive l’histoire de la Martinique et de la Guadeloupe. Dans Martinique décembre noir il s’agira des décès tragiques de trois Martiniquais Edmond Eloi Véronique, Christian-Pierre Marajo et Julien Betzi. Après la mort de ces jeunes tués par les forces de l’ordre, les émeutes vont entraîner des changements et révolutionner la vie politique et sociale de la Martinique de façon définitive. Une vision que confirme l’historien et journaliste Louis-Georges Placide dans un livre paru lors du cinquantième anniversaire des ces événements. Dans cet ouvrage, fruit d’une longue enquête, il explique que « ce soulèvement populaire urbain est perçu comme la première évaluation de la départementalisation votée en mars 1946. Il se situe dans un contexte international d’émancipation des peuples colonisés et correspond, en Martinique, à une période d’interrogation et de prise de conscience. Aussi des étudiants, des intellectuels, font-ils de ces émeutes la date fondatrice, en tout cas un repère essentiel, de la « nation martiniquaise » (1). Le documentaire aborde, images d’archives à l’appui, plusieurs des aspects politiques et sociologiques qui dès lors vont caractériser la Martinique.
Martinique, Décembre noir, épisode 4, lundi 1er août 2011 sur 13e rue Universal, 22 h 55
Décembre 1959. Alors que toute la Martinique s’apprête à fêter Noël, Fort-de-France est le théâtre d’une révolte populaire sans précédent. La répression est féroce : trois manifestants tués, cinq blessés, des commissariats détruits, des immeubles dévastés…
À l’origine des émeutes, un banal incident de la circulation. Une étincelle qui va embraser une île sous haute tension depuis des décennies et qui va sceller le nationalisme martiniquais. Ce décembre noir va entraîner la création de nombreux groupes indépendantistes ou autonomistes dont l’OJAM, l’organisation de la jeunesse anticoloniale martiniquaise qui proclamera d’emblée : La Martinique aux Martiniquais.
À la fois récit d’un fait-divers, mais aussi évocation des conséquences qu’il eût sur le devenir de la Martinique, ce documentaire dresse le portrait d’une société en plein bouleversement. En toile de fond, la France enlisée en Algérie et Cuba qui vient de tomber aux mains des castristes…
L’autre documentaire est également historique : depuis cette grève du bâtiment des 26, 27 et 28 mai 1967, qui a vu la mort de dizaines de Guadeloupéens, de nombreuses interrogations demeurent. Les documents qui concernent cette tragédie sont classés secret défense jusqu’en 2017. De nombreux ouvrages sur mai 67 permettent d’en savoir plus sur cette part de l’histoire de la Guadeloupe et de sa relation à la France. Parmi eux une nouvelle, Manman lagrev baré mwen – Mai 67 raconté aux jeunes, que l’on doit à Ernest Pépin, dans laquelle un grand-père revient sur les événements avec son petit. « Écoute-moi bien ! Je vais te raconter mai 67 en Guadeloupe », raconte l’homme dans ce livre. Il évoque la Guadeloupe de 1967 : « la Guadeloupe de 1967 n’était pas la Guadeloupe d’aujourd’hui. Elle n’avait pas encore pris le virage de la modernité comme vous dites. Tu ne peux pas imaginer comment les choses ont changé en si peu de temps ! Le pays sauçait dans la misère. Les champs de cannes couvraient une bonne partie du territoire. Ils bouffaient la sueur des nègres et des indiens, fatiguaient le soleil lui-même, procuraient une toute petite monnaie à celles et ceux qui travaillaient raidement. Souvent le peu d’argent mettait du pleurer sur les joues des mères de famille ».
Guadeloupe, mai 67 un massacre oublié, épisode 6, lundi 15 août 2011
À Pointe-à-Pitre, le 27 mai 1967, jour anniversaire de l’abolition de l’esclavage, des revendications syndicales d’ouvriers du bâtiment tournent à l’émeute. Une répression féroce va suivre. Les parachutistes déployés en Guadeloupe nettoient l’île avec des « méthodes algériennes ». Le nombre « officiel » des victimes de la répression ne sera connu qu’en 1985, lorsque Georges Lemoine, secrétaire d’État à la France d’Outre-mer, acceptera de lever le voile sur ce massacre. 87 morts. D’autres sources n’hésitent pas à évoquer le chiffre de 200…
Aucune enquête n’a jamais été menée pour connaître la vérité sur les journées de mai 1967.
(1) Les émeutes de décembre 1959 en Martinique – Un repère historique, de Louis-Georges Placide
L’Harmattan, paru en décembre 2009