France 5 diffuse Les Insurgés de Cayenne dimanche 21 à 21 h 30. Un film documentaire qui retrace les événements qui ont conduit au premier procès colonial à Nantes, en 1931.
Ce documentaire inédit de 53 minutes revient sur le premier procès colonial qui se déroule à Nantes, sur l »histoire de ces Guyanais accusés d’avoir lynché et tué six personnes. Leur histoire commence avec les émeutes qui secouent la ville de Cayenne suite à la suite des élections législatives de 1928. Sont alors au pouvoir trois hommes autocrates, le maire de Cayenne en la personne d’Eugène Gober, le gouverneur en place Camille Théodore Raoul Maillet et enfin le député candidat aux législatives : Eugène Lautier. Sur fond de fraudes, Eugène Lautier remporte les législatives.
Une victoire refusée par la population lucide quant à l’importance de la fraude qui dans le même temps apprend la mort suspecte, le 6 août 2008, de Jean Galmot (opposant à Eugène Lautier et soutenu par la population). Ce nouvel événement va mettre le feu aux poudres et entraîner des émeutes. Ces violences feront six victimes, plutôt proches de Lautier et Gober, qui seront lynchées et tuées.
Le procès qui va suivre est aussi historique parce qu’il verra la plaidoirie de Gaston Monnerville, l’un des avocats des accusés guyanais et futur président du Sénat, se transformer en plaidoyer contre le système colonial appliqué en Guyane. A propos de ce procès historique, Ariane Dadier écrit dans Le Mag de France 5 : « Pour éviter de nouveaux heurts, le tribunal de Cayenne est dessaisi au profit de celui de Nantes, dans un souci d’impartialité. Fin septembre 1929, après une traversée de vingt jours, quarante-cinq personnes sont écrouées dans l’ancien port négrier. Pendant la détention provisoire, la presse locale donne une image très négative des quatorze inculpés finalement retenus : des êtres frustes aux mœurs débridées, à demi sauvages, extrémistes et violents. Au cours des douze jours d’audience, les avocats de la défense, dont Henry Torrès, Alexandre Fourny et Gaston Monnerville, vont faire prendre conscience aux jurés, mais aussi à la France entière, que les Guyanais n’étaient pas considérés comme des citoyens à part entière, mais de seconde zone. Dans une plaidoirie remarquée, Gaston Monnerville donne une orientation politique au procès en parlant d’esclavage et de colonialisme. L’acquittement est prononcé : les accusés étaient donc des boucs émissaires ; la Guyane, gangrenée par la fraude ; et les crimes, la conséquence du truquage des élections ! On reconnaît enfin les droits des colonisés. Le suffrage universel et les valeurs républicaines retrouvent enfin tout leur sens ».
Les Insurgés de Cayenne est selon son réalisateur « une enquête sur le monde judiciaire et politique des années 30 en Guyane et en France et va révéler pour la première fois la fraude qui gangrène l’outre-mer et avant tout la politique coloniale. Ce procès fut un détonateur mettant en lumière les carences de la République sur les colonies. Ce procès sera le révélateur de la prise de conscience que l’homme noir est égal à l’homme ».
Le documentaire est enrichi d’images d’archives et de témoignages de descendants des victimes (Marie-George Thébia arrière-petite fille de Thélus Thébia ou Henriette Dorion-Sébéloué petite fille d’Eustache Servais) et d’autres protagonistes de l’époque (Pierre Fourny, fils d’Alexandre Fourny, ou Rose-Marie Gober nièce d’Eugène Gober).
Les Insurgés de Cayenne, film documentaire réalisé par Barcha Bauer (La dissidence aux Antilles et en Guyane, Antilles et Guyane, à l’heure de Vichy) et écrit par André Bendjebbar, sur une narration de Jean-Michel Martial et de Stana Roumillac.
Rediffusion : vendredi 26 mars, 23 h 51 sur France 5